Thérèse de Lisieux : jouir jusqu´à la mort

 

Thérèse of Lisieux: enjoying until death

 

 

 

 

Maria José Palma Borrego

 

palmaborrego@telefonica.net

 

Psicoanalista y escritora – Francia

 

 

 

Recibido:   27-10-2022

Aceptado:  10-06-2023

 

 

 

 

Rèsumè

Dans cet article, j´essaye de démontrer le rapport étroit entre une expérience religieuse limite et l´autodestruction. Dans le cas de Thérèse de Lisieux, le désir incestueux pour son père est déplacé vers la figure de Christ Jésus qui est l´enfant symbolique du couple père/ Thérèse. Sa mère, morte quand elle avait 4 ans, apparaît sous la figure sublimée de la Vierge. Triangle œdipien mystique où la modalité sexuelle choisie pour Thérèse est la soumission à la divinité paternelle, la souffrance et le masochisme, qui a pour but la jouissance et l´autodestruction. 

Mots-clés: sœur, mère, père, corps, folie et mort.

 

Abstract

In this article, I note that religion and the act of joining the convent mask a sexuality and an eroticism that are a source of great guilt, as the incestuous desire for the father is sublimated in the figure of Christ. In the case of Thérèse de Lisieux, where unconscious guilt generates such desire, a masochistic personality is created, that is given to suffering. This will lead her to self-destruction, and ultimately death. Moreover, the death of her mother when she was four years old would bequeath her a psyche that is consumed by a phantasy, an Other who would persecute her throughout her life; and, just as in the case of her father, she ends up sublimating her desire in the figure of the Virgin.  

Keywords: nun, mother, father, body, illness and death.

 

 

“A l´origine, tout être occupe un lieu

“d´élection qui lui sert de verbe, cet

être se tient là, dans une totalité

qui n´est pas un point de départ.

Son immunité de limites est une description

taciturne de la grâce ; c´est

l´espace exclusif qui ne veut pas anoblir

aucun de nos discours. Lorsqu´on perçoit

le premier mot de celui-ci, on est déjà hors de soi”

François Jacquin.

 

 

1. Masochisme et jouissance écrite

 

 

Histoire d´une âme est l´autobiographie de Thérèse de l´Enfant Jésus et de la Sainte Face, Thérèse de Lisieux, pour l´histoire et pour le Carmel. Elle paraît en 1898 et rassemble les trois manuscrits autobiographiques écrits par elle les deux dernières années de sa vie, à la demande de sa sœur Marie et par ordre de sa sœur Pauline devenue Révérende Mère Agnès de Jésus, Prieure du Carmel. Ces manuscrits sont appelés Manuscrits A, B et C.

Les mots et le style de Thérèse sont ceux de son temps, empreints du romantisme de l´époque où Thérèse écrit ses manuscrits, mais ils sont marqués par sa propre expérience, celle de l´amour de Jésus. Ils évoquent avec force les manifestations de cet Amour au cœur d´une vie humaine et nous enseignent le chemin qui la conduit à la confiance pour arriver à l´amour de Dieu. En nous confiant L´Histoire de son Âme, qui est le chemin pour arriver à Jésus, elle nous livre son secret, la recherche “du vrai dans la vie” (2015: 10), même si celle-ci signifie pour elle la souffrance et l´autodestruction provoquée par le “Père-version” et la mort.

Thérèse de Lisieux fut déclarée docteur de l´Église en 1997.

Dans cet article nous tiendrons compte des trois manuscrits A, B, C, pour avoir une vision ample de ce qu´a signifié l´amour du Christ pour la carmélite : la maladie et la mort. D´autre part, Thérèse de Lisieux a été un personnage fort singulier dans l´histoire de l´église catholique et du Carmel. Elle fait partie des femmes puissantes et fragiles, mais aussi psychotiques, de l´ordre des carmélites, dont l´origine de la filiation de ces femmes a été Thérèse d´Avila, fondatrice de l´ordre des carmélites déchaussées.

Du point de vue de l´écriture, L´Histoire d´une Âme suit Le Livre de ma vie et Les Demeures de la carmélite espagnole et les écrits de saint Jean de la Croix, “Notre Père”, dans les mots de Thérèse de Lisieux. Comme la carmélite espagnole, Thérèse de Lisieux va raconter dans son autobiographie, l´histoire de son évolution spirituelle, dont les échos de la thématique et de l´écriture de la carmélite espagnole sont toujours présents dans la perception et la visualisation du monde.

Thérèse de Lisieux naît le 2 janvier 1873 à Alençon (Normandie) et meurt le 30 septembre 1897 à Lisieux, après avoir prononcé ses dernières paroles : “Mon Dieu… je vous aime” (Thérèse de Lisieux, 2015: 12).  Dotée d´une vive sensibilité et d´une grande force spirituelle, Thérèse se voit très tôt confrontée à la souffrance de ses diverses séparations. La raison de cette souffrance est plurielle : la perte de sa mère à cause d´un cancer de sein à 4 ans et demi, le départ de sa chère sœur Pauline au Carmel, (Pauline, sa “chère petite maman”, et première mère de substitution de Thérèse enfant), l’entrée des autres sœurs au Carmel et quelques années plus tard, la mort de son père, qui la laissera complétement orpheline dans le monde.

Gravement perturbée à cause de la perte de sa mère biologique, d´origine, et bouleversée à cause de la folie de son père[1] en pleine adolescence, Thérèse va sombrer dans “une étrange maladie”, qui sera atténuée par le “sourire de la Vierge Marie”. Fait sublimatoire, qui ne la libérera ni de sa faute inconsciente ni du fantasme persécuteur de sa mère et plus tard de son père. Thérèse reste jusqu`à sa mort, une jeune fille fragile, inhibée et entravée dans sa croissance affective. L´amour ambivalent de la petite fille pour sa mère -et le père- persiste et cherche d´autres cibles pour mieux préserver l´objet maternel aimé/haï. Voilà le passage d´une lettre de Thérèse à sa maman. C´est la dernière qui parle : “Le bébé est un lutin sans pareil, elle vient me caresser en me souhaitant la mort : Oh ! que je voudrais bien que tu mourrais, ma pauvre petite Mère !” (Ibídem: 26). Elle souhaite de même la mort à son père quand elle est dans ses excès d´amour. 

Ainsi, ce sont généralement les autres enfants, filles dans le cas de Thérèse, car les garçons meurent très tôt, qui prennent la place de la rivale battue dans le fantasme de la fillette. Rivale œdipienne en effet, mais abîmée par des grossesses à répétition et vite emportée par la maladie, ce qui a pu être ressentie par la fillette comme une “femme battue” et peut-être comme source de la négation de la sexualité et de la maternité.

En effet, la perte de sa mère est la première séparation importante de la petite Thérèse, celle qui provoquera la déchirure primordiale chez l´enfant. Il y en aura d´autres dans sa vie, ce qui fera naître son désordre psychique, qui touche la mélancolie, le masochisme et la perversion, où le plaisir provoqué par la souffrance et la douleur l´amènera à l´écriture, matière et texture trouées de silences, et à la mort. Selon J. Kristeva, “Freud propose de penser que c´est la culpabilité interne au refoulement du désir propre du voyeur, qui crée la nécessité de punition avec ou sans scènes de punition observées” (Kristeva, 2008 : 459). Cette séparation mortelle fut pour la petite fille, en un sens, une maladie fulgurante. Une disparition pressentie et attendue. La maladie de sa mère survenait après une longue séparation où, à peine née, elle avait été confiée à une nourrice (Rasy, 1987: 13).

Voici la scène inaugurale, la scène traumatique, la séparation qu´on peut l´appeler paradoxalement secondaire/primaire : une fillette de quatre ans et demi est témoin de la maladie et la mort de sa mère d´un cancer de sein. Elle regarde.

La perte de sa mère renvoie Thérèse à la solitude, à l´individualité et au fait obligatoire de se confronter à la souffrance de la séparation primordiale. Celle-ci provoque un exil de l´enfance : “Elle rêvait du ciel où est sa maman”, origine de l´étrangeté de Thérèse pour le monde. Thérèse, étrangère au monde et à soi-même, pour évoquer le livre de Julia Kristeva (1988) Étrangers à nous-mêmes.

En effet, dans l´imaginaire de Thérèse, la mère absente devient “l´Autre”, “un Autre”, où sa présence marque l’absence et le vide de son âme, mais qui est toujours présent comme un spectre, comme un fantasme, comme un œil qui la regarde et la rend coupable en lui provoquant un deuil gelé, permanent, situé dans la “crypte mélancolique du féminin” (Kristeva, 1974: 22), et auquel Thérèse demande de la rédemption.  Un deuil qui aura sa représentation spatiale dans la chambre où meurt sa mère, et dans la cave sombre et silencieuse de la chapelle du couvent des carmélites de Lisieux et en général, dans le Carmel, signifiants qui représentent le lieu maternel. La crypte maternelle dans laquelle Thérèse désire retourner.

Le Carmel est l´espace silencieux et sombre du corps de la mère, qui se transfigure, par la puissance du langage et de la sublimation, dans des espaces symboliques, où Thérèse se sent bien, sans peur et tranquille. Cet espace calme va être fondamentalement la chapelle du couvent et, plus tard, pendant son voyage au Vatican, où elle va voir pour la première fois un appareil de photos, elle restera fascinée par l´œil de la caméra -un espace entre l´œil de Dieu et le sien- par lequel elle peut voir. Un œil qui l´amènera à la beauté de l´Italie, notamment de Rome et du Vatican, et qui va jouer un rôle important dans son organisation pulsionnelle :  l´œil de Dieu, qui surveille le rapport de Thérèse à son corps, à sa pratique masturbatoire, créant une culpabilité, qui est en rapport avec des attitudes passives par rapport à sa vie érotique et à l´objet sexuel (Freud, 1905). Position masochiste, qui produit des douleurs physiques et psychiques inouïes et jusqu`à la mort. Trop plein de jouissance, dirait Lacan. Trop plein de mort ou de jouir à mort.

Ainsi, l´auto récrimination, la culpabilité consciente, le complexe d´infériorité, la contradiction entre les sentiments manifestes de culpabilité et l´absence d’humilité  qui devaient accompagner Thérèse, ne sont qu´une expression, (n´excluant pas les composants agressifs d´un instinct sexuel exagéré et indépendant -sadisme-), mettant au premier plan à travers un déplacement vers l’objet sexuel, provoquant l´angoisse comme défense contre le fait d´être découverte et de la peur de la désapprobation. Instinct de mort, selon Freud (Horney, 1990 : 121).

Un jour que j´avais particulièrement désiré d´être humiliée, il arriva qu´une novice se chargea si bien de me satisfaire qu´aussitôt je pensai à Semeï maudissant David[2], et je médisais : “Oui, c´est bien, le Seigneur qui lui ordonne de me dire ces choses […]” et mon âme savourait délicieusement la nourriture amère qui lui était servie avec tant d´abondance (Thérèse de Lisieux, 2015 : 340-341).

Mais le Carmel sera aussi, dans sa pluralité de représentations, une “Cave sombre et silencieuse de la chapelle du couvent” (Rasy 1987 : 86) et le lieu de retour à la bienheureuse innocence de la “vie fusionnelle” où tout-est-mère. Comme si l´espace silencieux et sombre du corps de la mère se transfigure dans ces espaces symboliques. Un espace, qui par la puissance du langage et de la sublimation, se convertit dans l´espace vide de la chapelle du couvent et celui de l´intérieur de l’appareil photographique. Encore cet œil qui fascine Thérèse. Thérèse fascinée qui ne se souvenait pas du regard de sa mère ni ne connaissait le reflet de sa figure au couvent (au Carmel il n´y avait pas de glaces), frappée par la frugale voracité de cet objet sombre, l´appareil-photo, semblable à l´habit qui garantissait sa vocation. Elle savait que la photographie était un objet de mort. Comme si l´œil de Dieu était ce trou obscur capable de transformer la chimie provisoire et corruptible de son corps en une chimie durable et assurée, en une résurrection inorganique. En effet, l´appareil de photos symbolise un œil obscur, qui représente la mort comme le montre la photo faite peu avant sa mort. Dans cette photo, on peut voir un corps désincarné, faible, comme disposé à la résurrection. Mais l´œil symbolique de l´appareil de photos va rendre possible l´inscription de Thérèse dans l´histoire du carmel et sera un réservoir pour les croyants et les croyantes de tous les temps.

Dans sa lutte permanente contre le spectre maternel, Thérèse n´arrivera pas à vaincre, si on peut le dire dans ces termes, ce qui l´amènera à une souffrance inouïe, non sans une jouissance, elle aussi inouïe, et à la mort. Identification à la mère morte dans un corps vivant de fillette et plus tard de jeune femme sœur carmélite. Union de deux forces biologiques essentielles : instinct de vie et de mort. Dans ce sens, “Freud regarde les pulsions masochistes comme un phénomène essentiellement sexuel et implique le désir d´être une femme” (Horney, 1990: 106).

L´organisation sexuelle de Thérèse se traduit dans la triangulation œdipienne, par une “chronologie”. Il s´agit tout d´abord d´une relation symbiotique avec le corps de la mère vivante, et plus tard, après la mort de la mère, de la construction d´un fantasme, par la présence d´un “Autre” qui l´envahit. Tout cela, rien de plus et rien de moins, par rapport à la figure de la mère d´origine du triangle œdipien. On y reviendra plus tard.

Quant à la figure paternelle, elle est représentée par un père dont la fonction paternelle est défaillante, dans le sens où il ne fait pas Loi. La parole du père, qui est nécessaire pour accéder au Symbolique, n´est pas une parole d´interdiction (Lacan, 1956), ce qui creuse l´étrangeté de Thérèse pour et dans le monde, au point qu´elle souffre “dans un état psychotique”. Cependant, l´oncle maternel Guérin, sera une figure ambiguë   d´autorité dans la famille.

Mais revenons au père, compagnon d´une mère, tous les deux mariés pour calmer l´ardeur d´une vocation interrompue. Une union qui fut une substitution, un déplacement des sacrements, où le corps de la mère fut un corps pur et devient donc fatalement, un corps voué exclusivement à l´enfantement (Rasy, 1987: 15). Et un père assiégé par la maladie mentale, peut-être s´agissait-il d´une psychose, comme le texte nous le laisse entrevoir, à cause de laquelle il va être interné dans un asile psychiatrique jusqu´à sa mort. Un père ambivalent qui, d’une part, aime Thérèse, (“la petite reine de papa”) (Thérèse de Lisieux, 2015: 43), mais, d’autre part, est aussi très souvent occupé par la prière, donc éloigné d´elle. Encore une autre solitude, une autre séparation douloureuse pour Thérèse. Une pluralité de solitudes, comme celles exprimées dans Las Soledades de Luis de Góngora. Les femmes sont seules, fondamentalement seules, et Thérèse n´est pas une exception.

Toute seule et en solitude, Thérèse n´est d´aucun lieu ni de nulle part, sauf pour voir la figure bénéfique de Dieu. Se nouer à Lui avec une certaine faculté, quelquefois perdue, dans ces moments de silence du corps et dans la solitude des mots. Se taire seule et dans l´attente, c´est vivre un peu. Thérèse choisit ce destin.

Oui, Thérèse est seule. Elle aime un homme passionnément, un seul. C´est son Dieu. C´est son père. Je l´aime, il m´aime, dit la carmélite dans une osmose de passion paternelle. Il est absolument indispensable que cet homme ait souffert et qu´il soit mort. Ce martyre, ce Néant que Jésus a traversé, et la maladie de son père qui l´anéantit, apportent à la femme-Thérèse la preuve de ce que son expérience inconsciente lui a appris, mais que les mâles de ce monde s´emploient à dénier : il n´y a d´homme que castré, il n´y a de père que mort. Le regard de Thérèse sur le Christ de la chapelle du couvent, la réconcilie avec sa propre passion mélancolique pour son père/Dieu : passion de souffrir et, à la longue, de se figer dans l´indifférence, de mourir en fait. Amoureuse et coupable, la mort sera la seule réunion possible de Thérèse avec l´amour, avec le Père Idéal (Kristeva, 2008: 118). Voilà la passion de souffrir de Thérèse : “Avant de faire luire sur mon âme un rayon d´espérance, le Bon Dieu voulut m´envoyer un martyre bien douloureux qui dura trois jours” (Thérèse de Lisieux, 2015: 147). Mais cette souffrance au Père ne suspend pas la Loi ni la culpabilité au profit d´une jouissance dans la souffrance, ou souffrance-jouissance, dans l´ambivalence de la “Père-version”, car le calvaire à mort ne banalise pas la souffrance ni autorise l´inceste.  Au-delà du plaisir, dans le cas de Thérèse, il s´agit ici de jouir, où jouir avec le Fils-Père, est un jouir à mort (Kristeva, 2008 : 466). Mais la passion du père de douleur, invite Thérèse à mettre en actes ses pulsions sadomasochistes dans la réalité mondaine, avant son entrée au couvent et, plus tard, par des rituels excessifs : c´est ce qui est couramment encouragé dans la mortification et la pénitence jusqu´à assouvir son corps d´une orgie masochiste, de pénitences, de sacrifices et de martyres.

 Immolez des sacrifices de louanges et d´action de grâce voilà donc tout ce que Jésus réclame de nous” (Thérèse de Lisieux, 2015: 258).

Avec la disparition de sa mère, Thérèse n´a pas d´autres choix : ou bien essayer d´aimer l´homme-chair et os, ce qui n’est pas le cas de la carmélite, ou bien retrouver la mère dans la claustration, qu´on choisit en désespoir de cause pour se défendre de la scène primitive. Sa vocation pour se cloîtrer très tôt dans sa vie ne l´empêche pas de se plier à la volonté d’affronter une mère supérieure (voire plusieurs), histoire d´attiser ses latences homosexuelles, pas si inconscientes qu´il n’y paraît. En effet, la passion homosexuelle, se reconduit dans la communauté sororale des femmes idéalisées entre elles, servantes inconditionnelles du Phallus idéal.

Mais de toute façon, l´univers de la fillette est marqué, de sa naissance à sa mort, par la présence fantasmatique de la mère morte, c´est-à-dire, par un “Autre”, qui est l´objet imaginaire de son désir, qui l´investit et qui prend d´autres modèles de représentation et de fonction maternelles, comme c´est le cas de ses sœurs et plus nettement de Pauline, sa mère de substitution, à la maison et au Carmel, et de Céline sa “bien-aimée”, qui jouera cette fonction à la maison. “Pauline devient mon Jésus vivant”, nous dit Thérèse à la page 230 du manuscrit A de son autobiographie. Monde de femmes, qui ne vient qu´approfondir ce que je viens de dire là-dessus.

En effet, Pauline est élue prieure du Carmel de Lisieux en 1893. Thérèse est la plus petite des sept frères et sœurs, où les deux frères, Joseph Louis et Jean Baptiste sont morts à 5 mois et à 10 mois. Marie Hélène à 6 ans, Marie Mélanie Thérèse à 2 mois, Céline et Pauline à 90 ans, Marie à 80 ans et Léonie à 78 ans. Thérèse meurt à 24 ans. Monde du féminin, mais aussi monde de tendresse et de mort. “[…] étant la dernière de la famille, j´avais toujours été la plus aimée, la plus comblée de tendresses de mes sœurs”. (Thérèse de Lisieux, 2015 : 128). Prémonitoire du monde dans le couvent ? 

Actrice et victime en même temps, porteuse d´un désir incestueux refoulé, Thérèse “prend la place vide” qu’a laissée sa mère dans le triangle œdipien, ce qui la ramène inéluctablement au fantasme de “l´Autre”, qu´elle désire remplacer. Dans son imaginaire, elle remplace la mère morte devant un père séducteur et séduit par elle. Ce désir sera détourné par le fait du refoulement, provoqué par la répression de l´inceste, dont le symptôme sera un amour fou au Dieu-Père. Partir de ce monde, où Thérèse rêve et s´avoue son désir d´une mort proche, au cours d´une nuit noire, celle de son âme. La mort est décidément un élément fort pour accéder à la grâce, semble dire la carmélite, dans son état de disgrâce terrestre. Elle traverse ici le conflit métaphysique fondamental de tout être humain, et surtout, étant femme, celui d´être capable d´avoir l´intuition de la suprême vérité de l´Amour de Dieu, et en même temps, l´incapacité de traduire cette intuition et de la projeter dans sa vie quotidienne. De ce conflit, naît un élément dramatique dans le sens où elle dépense sa vie jusqu`à la mort.

En effet, en prenant la place de la mère morte, sa “faute imaginaire”, celle d´avoir désiré son père, est refoulée, ce qui créera un système défensif destiné à la sauver du désespoir et du mépris d´elle-même. La religion, la croyance et la foi sont les moyens que Thérèse a choisis devant la possibilité de désintégration du moi, l´éloignant ainsi de la folie, mais sans l´empêcher d´y être. Symboliquement, le Carmel sera pour Thérèse le lieu des épousailles, épouse de Dieu-Père, mais surtout, épouse du Christ, Dieu corporisé homme et mâle, vécu comme un autre spectre persécuteur, qui continue à la hanter inconsciemment, et qui cohabite avec l´idée d´une réparation impossible. L´amour de Dieu est l´amour d’un objet idéal et, étant un idéal, c´est le sujet qui le reconstruit et l´élabore à travers sa subjectivité. Dans le cas de Thérèse, c´est une idée de l´amour qui se construit à partir de l´idée de jouissance et de mort, de sa propre mort corporelle. Elle est victime de son propre holocauste. Ce désir qu’elle ne peut pas assumer, éclatera plus tard dans son écriture. À la page 246 du manuscrit A, il est écrit : “Offrande de moi-même comme victime d´Holocauste à l´Amour Miséricordieux du Bon Dieu”, où tous les membres de la famille

Veulent bien vous faire part du Mariage de leur Fille Thérèse, avec Jésus le Verbe de Dieu, seconde Personne de l´Adorable Trinité qui par l´opération du Saint-Esprit s´est fait Homme et Fils de Marie, la Reine des Cieux, texte de la Lettre d´invitation aux Noces de sœur Thérèse de l´Enfant Jésus de la Sainte Face. Fin du manuscrit A.

Holocauste génocide du corps de Thérèse, le Carmel sera encore un lieu de jouissance coupable, masochiste, ce qui génère chez Thérèse une haine violente dont la conséquence est l´expiation et l´immolation, la punition du corps : les périodes d´anorexie conséquence de la répugnance provoquée par la faute de la masturbation (Freud, 1901-1905), est la cause du retrait de la libido. Le refus de manger est provoqué par l´angoisse caractéristique des états psychotiques. (Freud, 1926). Thérèse devient ainsi, à la fin de ses jours et par identification au corps de sa mère morte, un corps cadavre. L’agressivité qu´elle déclare dans ses manuscrits, est produite par l´humiliation subie lors du conflit œdipien, son amour envers son père, la mère comme rivale.

Mais quel rôle joue la Passion, toujours meurtrière, pour le père-Dieu chez Thérèse ?

On se rappelle que pour Freud dans Totem et Tabou (1913), le meurtre du père est un acte fondateur, une réalité historique dans le cours de la civilisation humaine. Pour les croyants, le Christ est un personnage réel, meurtri et mort qui est commémoré. Je ne rentrerai pas dans cette démarche, n’étudiant que ce qui fait référence à la réalité psychique, qui génère chez Thérèse l´union de la foi aux fantasmes et aux représentations. Je m´intéresse à la logique selon laquelle le Père-Christ est mis à mort dans la Passion. D´ailleurs, dans le nœud de la Trinité, il semble difficile de dissocier la souffrance à mort du Fils de celle du Père, qui lui est consubstantielle. Pour la petite fille, cette situation veut dire que celui qu´elle aime -objet du désir maternel et fonction phallique, qui soutient son accès à la représentation, au langage et à la pensée-, se trouve dans le même état de victimisation que le Christ souffrant représenté dans la croix, qui se trouve dans la chapelle du couvent et pour lequel Thérèse n´est que fascinée et séduite. Il ne faut pas oublier que le père de Thérèse est un malade mental, qui ne laisse pas de présenter et de représenter sa folie aux yeux de la petite fille, “C´était pour moi un grand bonheur d´aller avec les religieuses à tous les offices ; je me faisais remarquer au milieu de mes compagnes par un grand Crucifix que Léonie m´avait donné et que je passais dans ma ceinture à la façon des missionnaires (Thérèse de Lisieux, 2015 : 101)

En assimilant le Fils et le Père, on obtient de soulager la culpabilité incestuelle qui pèse sur le désir pour le père, cet “Autre”, et on encourage l´identification virile avec cet homme supplicié. Une identification gratifiante, mais sous le couvert du masochisme. Thérèse se met en congé de sa vie pour éprouver tous les désarrois possibles devant ses sœurs -signifiant polysémique- et devant soi-même. Elle recouvre ce désir, d´une nostalgie impossible du ciel perdu, non vécu, mais réel dans le délire, à force de vivre dans une étrangeté permanente.

De cette façon, la voie est ainsi dégagée dans l´inconscient pour que le Père, comme agent de la Loi et de l´Interdit, puisse désormais se confondre chez le sujet dans la coupable passion amoureuse que Thérèse sent en tant que fille aimée de ce père, de Dieu. Synonymie des signifiants, qui exprime par des mots, les désirs secrets de la fillette. 

Il arrive à Thérèse que sa conscience prenne le chemin du repli, là où l´être tasse sa propre nature. Et le ravissement se produit chez la carmélite, il est une version du moi éclairé par l´Un surnaturel qui prend corps, son corps. Ainsi, ce qui n´est pas résolu de sa propre vie, ce qui n´est pas compris, elle le situe à l´extérieur, dans ce Dieu-Père, pour ne pas courir au précipice momentané, mais en jouissant lentement.

Toujours la mère. Mais aussi les mères du Carmel. Mères et sœurs, deux signifiants polysémiques, mais dans la vie de Thérèse, ils sont symétriques. Le jour de sa première communion, qu´elle célèbre dans le Carmel de Lisieux, elle écrit: “l´après-midi ce fut moi qui prononçais l´acte de consécration à la Sainte Vierge ; il était bien juste que je parle au nom de mes compagnes à ma mère du Ciel, moi qui avais été privée si jeune de ma mère de la Terre”. (Thérèse de Lisieux, 2015 : 105)

En effet, il existe une symétrie dans la filiation imaginaire de Thérèse, car toutes ses sœurs rentrent au Carmel, et toutes deviennent mères-sœurs, sœurs-mères de Thérèse, dont la Vierge Marie est la réédition subliminale et religieuse de la mère d´origine.

Quant à l´état fusionnel, il fait resurgir chez Thérèse le désir coupable qui se manifeste à travers les rêves, les hallucinations et les délires. Voir dans ce sens, le culte particulier de Thérèse à la Vierge Marie. C´est par le fait de nommer la mère morte sous le nom de la Vierge, que la carmélite peut transformer ses pulsions destructrices, par un processus de sublimation, en écriture.

Mais il est évident qu´on ne sort pas indemne d´une “faute imaginaire”, d´une telle régression. L´inconscient de Thérèse exprime son “mal être”, qui se traduit, comme c´est le cas ici, par les symptômes d´une véritable maladie : l´hémoptysie, qui lui provoque des hémorragies, une forte fièvre, inconscience, problèmes de déglutition, et surtout, exemple fidèle d’une régression à la mère, le corps de Thérèse se réduit à un espace minimal et à la quasi-immobilité. Cri hurlé de l´inconscient au Moi du sujet, goût morbide pour le Père-version. “Je deviens déjà squelette. Voilà qui me plaît” (Ibídem:115). Mais cette souffrance du corps est une gigantesque construction défensive contre le trop-plein de désir (Kristeva, 2008 : 455) “Je sautais sur les genoux de mon Roi, en disant les notes qui m´avaient été données [à l´école] et son baiser me faisait oublier toutes mes peines” (Thérèse de Lisieux, 2015 : 71).

En effet, la première étape de la construction du fantasme chez Thérèse, se manifeste par le retournement défensif du voyeurisme, potentiellement sadique : “Ce n´était qu´avec effort qu´il m´était possible de faire direction” (Ibídem:  202), qui se convertit, par un détournement de la libido, en masochisme inconscient : “Des montagnes infinies de souffrance”, nous dit-elle. “Oui, la souffrance m´a tendu les bras et je m´y suis jetée avec amour […]” (Ibídem: 199)

Ce retournement défensif de la libido à cause de la faute inconsciente, implique aussi une “érotisation secondaire” des zones prégénitales. Et ce détournement est un substitut régressif de la satisfaction génitale qui se décharge en masturbation : “[…]  j´étais si obéissante que jamais mon confesseur n´a connu ma vilaine maladie ; je lui disais juste le nombre de péchés que Marie m´avait permis de confesser […]” (Ibídem: 121), “Je me souviens de m´être confessée à Trouville même de ce plaisir enfantin qui me semblait être un péché […]” (Ibídem : 122).

Par rapport au trop-plein de désir:

 

“Ô mon Jésus ! je t´aime, j´aime l´Église ma mère, […] Mes immenses désirs ne sont-ils pas un rêve, une folie ???? (…) Si mes désirs sont téméraires, fais-les disparaître car ces désirs sont pour moi le plus grand des martyres” (Thérèse de Lisieux, 2015 :  271-272).

“Ce fut un baiser d´amour, je me sentais aimée, [3]et je disais aussi : “Je vous aime, je me donne à vous pour toujours” (Ibídem : 104).

 

Et puisque chez Thérèse, l´érotisation est si intense et autoérotique, elle est autant source de culpabilité que désir d´être aimée. Cette érotisation, en effet, sera refoulée dans l´inconscient. La permanence du masochisme inconscient féminin s´installera ainsi et s´accorde en outre de la passivité féminine requise et inculquée par les cultures traditionnelles (Kristeva, 2008: 457). Moi, je dirai tout court, par le patriarcat.

La première étape de la construction de la logique du fantasme est celle de la culpabilité, dont la synthèse Thérèse même l´explicite : “parce que le désir pour papa est si fort, je dois refouler ce qui me rend coupable, au point de convertir mon corps en néant par des punitions”. La deuxième étape du fantasme est celle du masochisme, où la culpabilité provoque une érotisation régressive vers l´oralité, l´analité et l´onanisme, qui se cristallisent dans le plaisir de la punition. “Souffrir à mort pour jouir à mort”, affirme Thérèse incapable de résoudre son conflit œdipien, où le refoulement de l´inceste engendre nécessairement et universellement la culpabilité et son corollaire le masochisme. Père-version, (le père comme symptôme chez Lacan), masochiste dont le but est la disparition du corps. Identification massive à la mère morte, où le Carmel devient aussi, le lieu de la sexualité féminine qui est le territoire de l´obscur, des catacombes et du monde souterrain, qui sert à Thérèse dans son processus de jouissance destructrice. La jouissance est toujours en rapport avec la mort, avec son devenir cadavre.

 

 

2. Au pays de ténèbres

 

 

Il existe beaucoup de façons de chercher. De se chercher. Explorer, quêter, fouiller… Poursuivre cette quête jusqu´au vertige, dès une passivité obsessionnelle qui mène à la perdition, mais sans perdre l´impétuosité déclarée, sans vouloir le dire comme c´est le cas de Thérèse de Lisieux. Dans son écriture, Thérèse vit et écrit pour la postérité du monde catholique, ou pour qui s’intéresse aux cas limites de la jouissance féminine.

Au long de son périple, elle nous fait sentir l´emprise du spirituel sur la matière, avec un effort de conciliation de la vie et à la fois de renoncement de celle-ci, nous présentant d´une manière constante, son imaginaire religieux, qui est à elle, à sa famille et aux alentours : la prière, la messe, la communion, la confession, la visite au Pape au Vatican, etc., tout cela et bien d´autres aspects, certainement pas anecdotiques, sont riches d´enseignements pour Thérèse, et s´entremêlent avec les séductions, les luttes et les soumissions, qui ne font que transcrire une réalité obscure et, de temps en temps, fabuleuse, un jeu entre le certain et l´incertain, un accord avec les forces de la divinité, créant un état d´esprit, pas loin de l´état mystique, où la profession de Thérèse est la mortalité de son corps, d´un corps qui jouit jusqu´à la mort. Mais aussi, Thérèse est une sorte de Pénélope dans sa fidélité à l´absent : Christ-Dieu-Père dans le domaine de la religion et de son père physique. L´illusion est parfaite et agit dans le sens de retrouver cet Homme par le renoncement du désir, qui sort malgré tout, espérant à se convaincre de son arrivée qui n´est que la sienne après sa mort.

La vie de Thérèse de Lisieux se développe dans un monde en apparence normal, mais, au fur et à mesure qu´on lit les pages de son autobiographie Histoire d´une âme, on s´aperçoit que, dans sa vie, il s´agit de l´expérience de se vivre comme un pays, comme un lieu, comme un territoire désirant un au-delà, où règnent les ténèbres, qui l´éloignent de la quotidienneté familière et de la réalité de son époque. Expérience qui lui sert à rentrer dans une atmosphère imprégnée de folie, notamment celle de son père, et celle de la destruction de son corps-fou, déjà psychotique, où la forclusion du Nom du Père, introduit Thérèse dans la cité destructrice de son imaginaire, de la psychose.

Le corps de Thérèse deviendra, par l´exaltation provoquée par son désir mystique, un corps identifié au Christ dans la croix, à cause de son propre travestissement. Ce corps est un lieu assiégé de l´extérieur par des forces inconnues, divines, et miné progressivement par les horreurs internes et externes, qui s´expriment par la macération corporelle et par des états de délire et d’hallucination. La mortification de la chair comme source de jouissance et plaisir.

Tout cela propulse Thérèse, comme ses sœurs Thérèse d´Avila et la mexicaine sœur Juana Inés de la Cruz, dans un monde où l´idée de la mort jusqu´à la mort réelle, dans le cas de la première, apparaît très tôt. La mort apparaît sans retour. Elle est le désir ultime de Thérèse de Lisieux.

Dans l´univers en perdition de Thérèse de Lisieux, les souvenirs d´une enfance heureuse avec son père, pas encore déclaré fou et interné, et avec ses sœurs, après la mort de sa mère, surgissent à chaque page de son autobiographie et de son autobiographie spirituelle. Mais malgré les plis de cette bienfaisance, un malaise se laisse entrevoir, peut-être, un malheur structurel, qui se traduit par des éclats, par des signes, lui permettant seulement de respirer un peu de vie, et située dans ce territoire du féminin qui jouit, entre la lucidité de la mort mortelle, physique, et l´ignorance de ce qui lui arrive. Autrement dit, de l´inexprimable rapport entre la pulsion de vie et la pulsion gagnante de mort. Rapport incommode aussi, qui signale aussi d´un côté, la peur de l´enfer, l´enfer même dont les morts ne peuvent pas sortir, et de l´autre, les puissances divines qui la sortiront pour des retrouvailles bénéfiques et éternelles au ciel. C´est du fond de cet irréductible, de ce qui ne peut pas se dire, et qui pourtant doit se dire, que s´élance la parole vive, tout à la fois dure et douce, décrivant des souvenirs d´elle et de la famille, qui conditionnent les choix de toute une vie ; la scène où elle voit le cercueil de sa mère où Thérèse est démunie de toute articulation possible.

Pour renouer avec son existence, s´extraire de la culpabilité. Thérèse revient constamment sur des scènes de son enfance, et, par le pouvoir des mots, s´intègre dans l´immense monde de silence et d´ombres du Carmel, et malgré la sècheresse de la construction architecturale du couvent, ce monde est plongé dans l´océan incompréhensible de femmes qui y habitent. Ces femmes ont aussi la compagnie du corps de Christ, hostie-chair, et de l´humidité rougeâtre des eaux, sang-vin, mais, surtout, dans le cas de Thérèse, elle est accompagnée du Verbe, du Logos et de l´avenir de l´écriture.

 

 

3. Le toucher et l´œil, sources d´érotisme.

 

 

Freud donne une importance capitale à l´organe. Ils sont ceux qui organisent la réalité pour l´obtention du plaisir. Il découvre que nos gestes, nos discours et nos pensées, participent du plaisir d´organe. L´organe travaille pour le plaisir ou pour prendre une satisfaction particulière (Montrélay, 1987: 87).

Avant Freud, Aristote dans la Métaphysique, attribue au toucher la propriété d´être le plus fondamental et le plus universel de tous les sens. Le toucher est un contact sans médiation, direct, entre le sujet et l´objet choisi. Il demeure entre le touchant et le touché un hiatus, une interruption entre l´espace et le temps.

Dans le cas qui nous occupe, le toucher va jouer un rôle important dans la satisfaction sexuelle de l´enfant Thérèse. Le panier des tissus, des toiles, des petits bouts de tissu déchirés, des taffetas, le voile, des velours épais etc. trouvés dans la chambre de sa mère morte, sont pour Thérèse les seules traces reconnaissables du sentiment humain. Tout ce fouillis incohérent, nous renvoie sans intermédiaire, à une organisation érotique, dont le toucher et l´œil occupent une place importante pour l´obtention du plaisir. Le monde renfermé de la chambre maternelle, qui s´ouvre à ses sensations de la fillette, est d´une richesse infinie. Le regard, qui rend possible le toucher, fascine, disperse et parfois paralyse. La diversité qu´elle trouve, l´intéresse dans sa recherche et, bien sûr, l´inquiète.

La description que Thérèse fait des objets, qu´elle trouve dans le panier dans la chambre de sa mère, me fait réfléchir sur les détails, ce qui est sans doute, penser à leur degré d´autonomie, à l´annonce d´une mort qui se prépare, à partir de cette situation.

Affirmer le voile, “un souterrain où je ne vois rien qu´une clarté à demi voilée” (Rasy, 1987:  101), être un être ou une “lettre volée”, sous des différentes formes, sert à détruire le voile, qui caractérise toute la sexualité féminine, pour se dévoiler ouverte devant Christ-Père, ou, paradoxalement, pour se voiler à soi-même, en rentrant au Carmel, et aux autres. Ce sont les moyens de Thérèse pour obtenir le plaisir dès son enfance jusqu`à sa mort.

Aux yeux de la petite fille, le panier, cadeau de sa cousine, lui rappelle le tombeau de sa mère et “lui parut rempli de façon absolue, exactement comme un panier doit être” (Ibídem: 24). À l´intérieur de celui-ci, un monde de couleurs, rouge, bleu-ciel, vert, ocre-jaune, cramoisi, lilas, violet, gris-bleu, rose et des tissus, des bandes de cheveux, des rubans, des taffetas, des velours et des dentelles, tout cela conforme un fouillis incohérent qui donne à Thérèse la possibilité d´exister en tant que sujet sexué. Pulsion scopique. Le plaisir de l´œil. Les visions de Thérèse au Carmel.

Les habits, le fil d´or et les morceaux de tissus, représentent des objets d´une médiation entre la profondeur intérieure et le milieu extérieur, qui comporte chez Thérèse un sentiment d´étrangeté, vis-à-vis des autres personnes. La toile et les tissus avec ses couleurs, sont des objets partiels, qui ont une fonction de séparation et de réparation. C´est dans ce sens, qu´on peut les considérer comme l´objet transitionnel dans le sens que lui donne Winnicott (1971).

Revenons au toucher, compris comme générique de tous les sens. Le corps de Thérèse devient une surface ouverte qu´Eros rassemble. Il tient ensemble toutes sortes d´éléments de la réalité, mais l´Eros chez Thérèse est morcelé, les surfaces qu´il organise sont partielles et à la fois, tout son corps est exposé comme une source de plaisir dont le toucher enfantin reste comme l´élément prioritaire jusqu`à son entrée au Carmel. Pendant son enfance, le corps de Thérèse peut toucher tout et être touché, et ses yeux peuvent toucher le visible comme l´invisible du corps de Christ.

L´entrée au Carmel suppose pour Thérèse, le retour, la régression peut-être, à un Eros-corps morcelé, partiel au regard des autres personnes et de soi-même et. Corps-synecdoque. Réduction au minimum de l´autoérotisme pour que celui-ci se déplace aux figures du Père-Christ et de la Vierge. Une Sainte Trinité, soi-disant laïque, pourquoi pas mystique, dont l´enfant symbolique est Jésus. Un triangle conformé par les déplacements des figures parentales, ou, en tout cas, une trinité pleine de désirs, corporelle.

Le toucher des tissus, des habits qui cachent le corps de la mère morte et de Thérèse au Carmel, sauf la figure et les mains, comme celles de sa mère entrevue dans la chambre mortuaire, le toucher est primordial et laisse chez l´enfant une scène qui laisse entrevoir une transposition et similitude identificatoire à la mère morte, dont le but de la carmélite dans cette identification est la disparition de son corps, à l’image du corps disparu de sa mère.

Mais l´entrée dans le Carmel et le corps caché de Thérèse sous les toiles de l´habit, réactualise le passé traumatique dans le présent, manifesté par la pétrification du corps et de son regard à perpétuité. Thérèse prend plaisir dans le regard au linceul qui enveloppait sa mère, un peu plus tard, dans le regard et le toucher du panier plein de tissus et de couleurs, et finalement, dans son présent de carmélite, elle prend plaisir dans la souffrance inouïe. “Je souffre beaucoup, mais je sens que je puis encore supporter de plus grandes épreuves”. (Thérèse de Lisieux, 2015 : 210). Intersection des surfaces chez Thérèse limitée à deux organes et où on ne voit pas les limites entre la réalité et l´imaginaire. Mais le corps “étranger”, “l´Autre” qui habite Thérèse, ne prend pas forcément l´apparence d´un objet surnaturel, mais de représentations iconographiques du Christ-Corps et de la Vierge-Mère.

Et ce corps meurtri, ouvre aussi d´autres possibilités spatiales et amoureuses, qui débouchent dans une augmentation de la tension sexuelle, où le non-dit fait retour et frappe d´une façon traumatique la carmélite “il me semble que l´Amour me pénètre et m´environne, il me semble qu´à chaque instant cet Amour Miséricordieux me renouvelle” (Ibídem: 240). “Éternellement elle chantera avec cette Mère chérie le cantique toujours nouveau de l´Amour […]” (Ibídem: 241).

Il s´agit, en effet, d´une érotisation, d´un plaisir en rapport avec une économie libidinale sublimée à travers l´accès au Symbolique, c´est-à-dire, aux mots, seule façon symptomatique de toucher le non-dit de la jouissance féminine. Ce plaisir ne se prend plus à la féminité en tant que telle, mais au signifiant, à la seule métaphore de l´amour (Montrelay, 1977: 109).

Le plaisir du toucher de Thérèse, donne priorité aux objets attachés à la maladie de la mère morte, où seule l´absence valorise la présence de “l´Autre”. Ce plaisir a un caractère pervers, fétichiste, où les toiles et les couleurs remplacent le corps de la mère, qui prend pour elle la valeur d´exception, dont les dépenses des énergies sont au négatif, par l´absence de la mère, l´objet aimé.

Le cas de Thérèse illustre la règle générale selon laquelle la sexualité féminine est ramenée sur la scène de la jouissance par une perversion, celle du père le plus souvent, mais parfois d´une femme “homosexuelle” de la famille. Dès lors, le désir pour survivre doit faire retour du côté de la mère, où sein et voix sont fondamentaux dans le sens étymologique du terme, mais cela n´a pas été le cas de la carmélite, car ce détour à la mère s´avérait impossible si ce n´était pas de façon imaginaire ou dans une communauté sororale.

 

 

4. Entre le lit et le carnet : un souffle de mort qui passe par des mots. 

 

 

L´écriture pour Thérèse circonscrit les figurations d´une absence qui est loin quand elle sent s’approcher la mort.

 

“Sans doute, ma Mère chérie, vous vous demandez avec étonnement où je veux en venir, car jusqu´ici je n´ai rien dit encore qui ressemble à l´histoire de ma vie, mais vous m´avez demandé d´écrire sans contrainte ce qui me viendrait à la pensée ; cen´est donc pas ma vie proprement dite que je vais écrire, ce sont mes pensées sur les grâces que le Bon Dieu a daigné m´accorder. Je me trouve à une époque de mon existence où je puis jeter un regard sur le passé ; […] C´est pour vous seule que je vais écrire l´histoire de la petite fleur cueillie par Jésus, aussi je vais parler avec abandon, sans m´inquiéter ni du style ni des nombreuses digressions que je vais faire (Thérèse de Lisieux2015: 22-23).

 

Et à la fin du manuscrit B, vient le moment de la demande de sa sœur Marie.

Ignorante des épreuves de Thérèse [la tuberculose progresse], Marie profite de la retraite annuelle de sa petite sœur, temps particulier de solitude, pour lui demander de mettre en écrit “sa petite doctrine”. Le manuscrit B est la réponse de Thérèse à cette demande (2015 : 253), mais aussi Thérèse répond à sa sœur : “Enfin, ma Mère, je n´écris pas pour faire une œuvre littéraire mais par obéissance” (Ibídem: 297).

Plus tard, “Nous sommes en septembre 1896 […] Peu après la fête de Pâques, elle est entrée dans la “nuit de la foi” qu´elle écrira dans le manuscrit C. La perspective du Ciel, qui faisait auparavant toute sa joie, n´est plus aujourd´hui que l´objet de tourments (Ibídem: 253).

Et voilà la réponse de Thérèse :

 

“Mère chérie, je vous obéis et si maintenant vous ne trouvez pas d´intérêt à lire ces pages, peut-être qu´elles vous distrairont dans vos vieux jours et serviront ensuite pour allumer votre feu ; ainsi je n´aurais pas perdu mon temps… Mais je m´amuse à parler comme une enfant, ne croyez pas, ma Mère, que je cherche quelle utilité peut avoir mon pauvre travail ; puisque je le fais par obéissance, cela me suffit et je n´éprouverais aucune peine si vous le brûliez sous mes yeux avant de l´avoir lu” (Thérèse de Lisieux, 2015 : 354).

 

Ma pensée, ma parole sont rédemption. Mon écriture aussi, semble répondre Thérèse à la demande d´écriture de sa sœur-Mère. Avec cette réponse qui est l´écriture, elle s´abandonne sans s´inquiéter de l´Autre, mais, paradoxalement, elle s´affirme en écrivant un “je” qui raconte son propre vécu, l´histoire de son âme, elle aussi charnelle. Et dans cette expérience, la souffrance physique de Thérèse, qui ne manque pas d´embrasser le désir et la chair charnelle, se déploie de plus en plus vers l´esprit.

Abandonnée au Bon Dieu, traversée par Lui comme Thérèse d´Avila dans la statue du Bernin, mais en corps et chair, Thérèse nous signale : “j´avais dit, comme un enfant, des paroles qui ne venaient pas de moi, mais de Lui” (Ibídem: 339), dans ce sens, la carmélite s´expose, sous un fond de masochisme et à travers son écriture, elle souligne son obéissance à la demande de sa sœur-Mère. Elle, qui fait exploser son désir par son corps souffrant, permettant ainsi, par des mots et par des idées, par son écriture enfin, une jouissance du caractère masochiste.

Pour elle, qui écoute et répond à cette demande de son “surmoi”, la symbolisation est une question d´oreille et un ordre. Ainsi, “le surmoi féminin s´enracine dans une vigilance critique, qui peut aller jusqu´au délire d´autoconservation. […] les conflits de cette construction symbolique fortement investie et l´excitabilité tout aussi consistante puissent engendrer les symptômes dans ces personnalités conflictuelles, dédoublées, qu´on appelle des “hystériques”, très fréquemment chez les femmes, bien qu´elles n´épargnent pas les hommes ayant suivi un parcours analogue (Kristeva, 2008:  462)

D´autre part, le refoulement de l´inceste, qui provoque une culpabilité insupportable, est déplacé vers la figure de Dieu-Père-Fils, dont la conséquence est la souffrance passionnelle : “il m´est très nécessaire que cela me soit une souffrance” (Thérèse de Lisieux, 2015: 331), qui autorise, plus tard, l´amour intellectuel par la sublimation. Il s´agit ici d´une jouissance sublimatoire attachée à ses propres capacités de dire et de penser pour et avec l´aimé/l´amant. Carrefours du désir et du sens bords pour penser la pensée.

“Si les paroles mêmes de Jésus ne me servaient pas d´appui, je serais tentée de vous demander [à sa sœur-Mère] grâce et de laisser la plume… Mais non, il faut que je continue par obéissance ce que j´ai commencé par obéissance[4]” (Ibídem: 322).

Autrement dit, Thérèse souffre, en effet, et elle écrit sa souffrance. Elle s´abandonne à l´écriture. Celle-ci investit le langage qui se fait écriture et en écrivant, elle se donne la “chance”, une chance presque mortelle, mais une chance enfin, d´écrire la peur de sa mort proche, c´est pourquoi l´investissement de la souffrance en langage provoque une intense symbolisation-création. Thérèse écrit L´Histoire d´une âme, deux mois avant sa mort. Elle écrit une folie assumée et cependant traversée para la jouissance du dévouement et par un masochisme réel, dans le sens qu´il se voit dans sa chair, et sublimé. En effet, pendant les deux mois qui lui restent à vivre, la pulsion de mort se libère, soit par des accès théologiques, soit par la sublimation et l´écriture.

A la différence de Thérèse d´Avila et de Juana Inés de la Cruz, qui écrivent par mandat de leurs confesseurs, Thérèse de Lisieux écrit par ordre et obéissance à sa sœur, qui voit dans cette possibilité, un enseignement, une pédagogie pour les autres, de la vie vertueuse de sa sœur. 

Le mandat de cette sœur, de caractère surmoïque, est assumé par Thérèse dans sa chair avec le sacrifice de sa vie et dans son écriture, la loi de Dieu, la loi du Père, incarnée dans le désir de sa sœur qui de ce fait ne rencontre pas des limites. En se mettant dans cette position sacrificielle, elle accepte un surmoi féminin, féroce, cruel et fou et s´identifie à cet inanimé que Freud a appelé pulsion de mort. Ce n´est qu´en dépassant la Loi paternelle, au nom d´une autre loi plus haute, divine, que l´accès de Thérèse à la jouissance hors du champ symbolique est envisageable.

Chez Freud, le Surmoi est conçu comme une instance régulatrice, héritière du complexe d´Œdipe, représentant de l´instance paternelle, interdictrice. En effet, pour Freud le Surmoi est le résultat de l´introjection des interdits à la fin de l´Œdipe. Il est une instance régulatrice du “ça”, qui lui-même est le réservoir des pulsions. De cette façon, le surmoi chez Freud est connecté à la jouissance phallique, qui peut être multiple et se répéter, mais elle trouve un point d´arrêt, qui ne permet pas d´atteindre l´illimité, l´infini, la totalité mortelle. On pourrait dire que le Surmoi est à cause de la castration et qu´il implique “une instance de vie”.

A cette position freudienne, Lacan dans L´étourdit (1972) apporte une modalité nouvelle, qui avance sur le concept de Surmoi féminin, dans le sens de crime, car sa voix dit : “châtre-toi pour connaître cette Autre jouissance”, ce qui peut s´adresser au partenaire -de sa sœur à Thérèse- ou au sujet lui-même.

Dans le cas de la carmélite, je pense que le mandat surmoïque féminin se donne dans les deux sens. La loi du Père-Dieu, sa voix, qui “dirige” la courte vie de Thérèse et l´écho de la loi paternelle inscrite dans le mandat de sa sœur en lui ordonnant d´écrire sa vie peu avant de mourir, période où cette Autre jouissance peut être considérée comme un “trop plein de jouir”.

Du point de vue de Mélanie Klein, le Surmoi féminin est incarné par la mère et plus tard dans le cas de Thérèse de Lisieux, par ses sœurs-mères[5], spécialement Marie, qui s´ouvre à demander à Thérèse l´écriture de sa vie. Cette demande est connectée à la jouissance phallique dans la mesure où la mère, ou les substituts de la mère, sont aussi réglés par le principe de limitation, voire de la castration. Mais étant donné dans ce cas que les substituts de la mère sont toutes des femmes, ce principe de limitation est connecté à l´Autre jouissance, en tant que la mère est une femme comme nous venons de le dire. Cette Autre jouissance n´a pas de représentation familiale, car elle a affaire à cet illimité, à cet au-delà de l´Œdipe. Comme Thérèse d´Avila, Juana Inés de la Cruz et bien d´autres mystiques et carmélites. Thérèse de Lisieux sacrifie sa possibilité de maternité, qui se produit très tôt dans les vies des trois sœurs, pour dépasser la loi phallique, paternelle, et se mettre au service de la loi divine, c´est-à-dire, au service de l´Autre jouissance -on peut dire avec Levinas, Dieu est l´Autre ou un Autre-, qui échappe à la signification phallique, car selon Lacan (1975: 12) dans le Séminaire XX, Encore: “Il y a une jouissance à elle, à cette elle qui n´existe pas et ne signifie rien. Il y a une jouissance à elle dont peut-être elle-même ne sais rien, sinon qu´elle l´éprouve, ça elle le sait. Elle le sait bien sûr, quand ça arrive. Ça ne leur arrive pas à toutes”.

La voix de ce Surmoi féminin est celle qui demande est le concept psychanalytique pas commande. C´est pourquoi Thérèse écrit sous la présence de sa sœur et de cet Autre qui lui ordonne de “jouir à mort”. Et dans un autre sens, cette jouissance est liée à la voix du Surmoi psychotique, qui “pousse à la femme” jusqu´à dans le Réel, qui se déchaine quand les barrières ne permettent plus d´endiguer la jouissance de l´Autre, au moment où le sujet se retrouve avec la force qu´aucune digue peut arrêter.

On a dit que le Surmoi féminin est lié à la jouissance de l´Autre. Il est lié à la fois au signifiant du manque de l´Autre et à l´illimité. Autrement dit, il fait référence à l´impossibilité de dire, de se dire[6] chez notre carmélite et à la torture pour trouver le mot juste. Il n´est pas qu´un vide comme celui de toutes les femmes par rapport au langage, car il existe dans celui-ci, une castration, une forclusion du signifiant “La Femme”. Dire la vérité, toute la vérité, est impossible pour nous, femmes. Pour Thérèse : les mots lui manquent, ainsi son écriture est soutenue par un Surmoi féminin implacable et féroce, qui tire sa force de ce trou du langage. Écriture qui est pour la carmélite, l´accomplissement de son désir d´occuper la place mortelle de la figure de Christ dans la croix.

 

 


 

Bibliographie

 

 

 

Freud, Sigmund ([1926] 1970-1988) : Inhibition, symptôme et angoisse (1926 pour l’édition allemande). París: PUF.

 

_____. (2014) : Inhibition, symptôme et angoisse. Paris: Payot.

 

_____. (1905): “Trois essais sur la différence sexuelle ; fragment d´une analyse d´hystérie (Dora) et d´autres textes”. En : Œuvres Complètes Psychanalyse, vol. VI, 1902-1905. Paris: PUF.

 

_____. (1913) Totem y Tabou. Viene: Beacon Press.

 

Horney, Karen (1990): La sexualidad femenina. Madrid: Alianza.

 

Klein, Melanie. (1987) El psicoanálisis de niños 2. Barcelona: Paidós.

 

Kristeva, Julia. (1974) Histoires d´amour. Paris: Denoël.

 

_____. (1988) Étrangers à nous même. Paris: Folio.

 

_____. (2008) Thérèse mon amour. Paris: Fayard.

 

Lacan, Jacques (1972) L´Étourdit. Paris: Psychanalyse et Société.

 

_____. ([1974] 1975) Séminaire XXII : RSI. Paris: Seuil.

 

_____. (1997) Hors sujet, LGT.

 

_____. (1998) Seminario 4: la relación de objeto. 1956-1957. Argentina: Paidós.

 

_____. (2013) Eros littérature et Philosophie. Paris: Grasset-IMEC.

 

Montrelay, Michelle. (1977) L´Ombre et le Nom sur la féminité. Paris: Minuit.

 

Rasy, Elisabetta (1987) : La Première extase, Paris: Rivages.

 

Sainte Thérèse de Lisieux (2015) : Histoire d´une âme. Manuscrits autobiographiques. Paris : Emmanuel.

 

Winnicot, Donnald. (1997) Realidad y juego. Barcelona: Gedisa.

 



[1] La maladie de son père fut marquée par des hallucinations. Le 23 juin 1888, il s´enfuit de chez lui et ne fut retrouvé que quelques jours plus tard. Plus tard, en février 1889, il sera interné dans un asile psychiatrique.

[2] Thérèse fait allusion à un passage du second livre de Samuel. Alors que le roi David fuit Jérusalem pour échapper à son fils Absalom, un homme nommé Sémeï le maudit publiquement. Abishaï, un des guerriers du roi, veut tuer l´imprécateur. Mais David l´arrête en disant : “S´il maudit, c´est peut-être parce que le Seigneur lui a ordonné de maudire David. Alors, qui donc pourrait le lui reprocher ? (2S 16,10).

[3] C´est moi qui souligne.

[4] C´est moi qui souligne.

[5] Voir le concept du “maternel” chez Mélanie Klein (1987).                

[6] Pour cela, voir le roman de Marie Cardinal Les mots pour le dire.